Karel Huybrechts pour
Le Quotidien géopolitique – Geopolitical Daily/
de LUC MICHEL (ЛЮК МИШЕЛЬ)/
2023 04 08/ Série V/

Les Émirats arabes unis sont conscients des risques de contourner les sanctions, mais ce pays et d’autres États riverains du golfe Persique sont déterminés à s’adapter à la réalité de ce qu’ils considèrent comme un « monde multipolaire », a écrit, vendredi 7 avril, le magazine économique américain, Forbes, soulignant que l’Arabie saoudite se détourne également des États-Unis.

D’après Forbes, cela a commencé avec l’Arabie saoudite. Le président américain Joe Biden a été accueilli froidement lors de sa visite à Riyad en juillet 2022. Les Saoudiens ont ensuite choisi la Chine comme médiateur pour la reprise des relations avec l’Iran.

Le magazine a poursuivi, en déclarant que Biden a invité le président des Émirats arabes unis Mohammed ben Zayed (MBZ) à venir à Washington l’été dernier. Le fait que la visite n’a toujours pas eu lieu est révélateur des différends dans les relations entre les Émirats arabes unis et l’administration Biden.

Il est très peu probable que le président des Émirats arabes unis se rende à Washington, parce que l’escalade des tensions entre les deux pays coïncide avec le renforcement des relations d’Abou Dhabi avec Moscou et Pékin, a indiqué Theodore Karasik, conseiller principal du think tank Gulf State Analytics basé à Washington.

Selon lui, il semble que les Émirats arabes unis adoptent une attitude attentiste et attendent de voir ce qui se passe entre l’Arabie saoudite, l’Iran et la Russie, mais il est clair que l’Occident n’est plus le choix exclusif des cheikhs émiratis.

La pression des États-Unis et de leurs alliés sur les Émirats arabes unis pour qu’ils coupent les liens avec la Russie a eu un impact particulier sur ce choix. Au cours des derniers mois, les États-Unis, l’Angleterre et les responsables européens se sont rendus à plusieurs reprises à Abou Dhabi pour arrêter les exportations de ce pays vers la Russie.

Malgré les sanctions, les exportations de pièces électroniques des Émirats arabes unis vers la Russie ont été multipliées par sept au cours de la dernière année, a fait savoir Forbes.

Dans ce droit fil, le secrétaire adjoint au département de Commerce des États-Unis, Matthew Axelrod, a averti dans un communiqué que ceux qui tentaient de contourner les sanctions russes, devraient être tenus pour responsables.

De plus, Kristian Coates Ulrichsen, le chercheur sur le Moyen-Orient à l’Institut Baker de l’université Rice a estimé que les EAU ne reculeraient pas face à ces menaces des États-Unis et de leurs alliés. Selon lui, ni les EAU ni les Saoudiens n’ont l’intention d’abandonner la politique de renforcer leurs relations avec les pays orientaux.

Au cours des 6 derniers mois, le gouvernement américain a sanctionné au moins trois entités émiraties pour le commerce illégal avec la Russie, a-t-il souligné.

Selon le directeur du programme Reinhard sur la lutte contre le terrorisme, Matthew Levitt, bien que les EAU voient les États-Unis comme leur partenaire de sécurité, ils veulent des liens étroits avec la Chine et la Russie, a indiqué.

EMBARGO SUR LE DIESEL RUSSE: DES RISQUES POUR L’OCCIDENT

L’Occident et ses alliés s’accordent sur de nouveaux plafonnements de prix pour le diesel et le fioul russes.

Le plafond sur le tarif des importations de produits pétroliers russes raffinés (essence, diesel, gazole, kérosène…) entrera en vigueur le 5 février prochain, date convenue par le G7 (l’Allemagne, le Canada, les États-Unis, la France, l’Italie, le Japon, le Royaume-Uni) et l’Union européenne.

L’Union européenne fixera le prix des produits pétroliers raffinés importés de Russie à 100 dollars le baril de diesel et à 45 dollars le baril de fioul, ont confirmé vendredi 3 février des responsables à Bruxelles.

La mesure entrera en vigueur dimanche, deux mois après le plafond initial de 60 dollars sur le prix du pétrole brut transporté par voie maritime. Les États-Unis, l’Australie et d’autres membres du G7 ont déjà adopté le plafond, des sanctions conçues pour limiter les revenus énergétiques de Moscou au milieu du conflit en Ukraine.

« Nous encourageons les importateurs de pétrole brut et de produits pétroliers russes transportés par voie maritime dans des pays situés en dehors de nos juridictions à continuer d’utiliser le plafond des prix comme levier pour acheter du pétrole et des produits pétroliers russes à prix réduit », ont déclaré les membres de l’UE.

L’embargo prévu a alimenté les craintes de ruptures d’approvisionnement mondiales. Le diesel se négocie actuellement entre 110 et 120 dollars le baril, tandis que le pétrole brut oscille autour de 80 dollars.

Le G7 a cherché à faire appliquer la mesure en interdisant aux compagnies maritimes d’accéder aux services occidentaux d’assurance, de courtage et de financement à moins qu’elles ne respectent le plafond des prix.

Moscou a réagi en interdisant la vente de pétrole et de produits pétroliers à quiconque choisit de se conformer au plafonnement des prix. Le vice-Premier ministre russe Alexander Novak a déclaré en décembre que le pétrole peut et sera plutôt redirigé vers l’Asie, l’Afrique et l’Amérique latine.

Des efforts pour obtenir l’accord des 27 membres de l’UE ont pris un certain temps en raison de la ligne dure de la Pologne et des États baltes, ont déclaré des responsables anonymes au Financial Times. Bruxelles réexaminera le plafond tous les deux mois, en tenant compte de son effet à la fois sur les revenus russes et sur les « turbulences possibles » sur les marchés mondiaux de l’énergie, selon le média.

Les responsables de l’UE s’adressant au Financial Times ont décrit le plafonnement des prix comme une « mesure restrictive bien équilibrée qui maintiendra le prix du pétrole et des produits dérivés suffisamment bas pour réduire les revenus de la Russie tout en garantissant l’accès aux pays tiers ».

Les analystes du marché sont cependant sceptiques. Un analyste a déclaré vendredi au média américain CNBC que l’embargo était « assez sans conséquence » jusqu’à présent. Un autre a noté qu’il avait été « inventé par des bureaucrates diplômés en finance » qui ne comprenaient pas les marchés pétroliers et avait « complètement échoué ».

Or, les États-Unis ont salué l’accord. La secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen a déclaré Yellen dans un communiqué, diffusé par le service de presse du ministère des Finances : « L’accord d’aujourd’hui s’appuie sur le plafond des prix des exportations russes de pétrole brut que nous avons fixé en décembre et contribue à faire avancer nos objectifs de limitation de la principale source de revenus de la Russie (…) tout en favorisant la stabilité des marchés de l’énergie ».

Selon les plans de Washington et de ses alliés, la politique de plafonnement des prix revient à interdire aux entreprises de transport occidentales de transporter du pétrole et des produits pétroliers russes vers des pays tiers s’ils sont livrés à un prix supérieur à la limite fixée par l’Occident. De plus, il est interdit aux institutions financières occidentales d’assurer de telles expéditions si elles sont effectuées par des opérateurs indépendants. Le 27 décembre 2022, le président russe Vladimir Poutine a signé un décret sur les mesures de rétorsion contre l’instauration par l’Occident d’un prix plafond du pétrole russe, interdisant son approvisionnement aux acheteurs qui ont adhéré à cette restriction à partir de février. Le décret est entré en vigueur le 1er février 2023 et est valable jusqu’au 1er juillet 2023.

Certains économistes ont réagi aux embargos anti-russes de l’Occident et ses alliés ; l’interdiction de l’UE sur les importations de produits pétroliers russes pourrait d’après eux perturber les flux commerciaux mondiaux après l’entrée en vigueur de la mesure le 5 février.

Les sanctions du bloc visant les produits pétroliers raffinés, y compris le diesel et le carburéacteur, pourraient finalement avoir un impact sur l’approvisionnement global en raison du risque que les restrictions pourraient forcer la Russie à freiner la production et le raffinage, a écrit TASS.

« Les barils sortiront et trouveront un marché, un défi logistique mais pas un défi d’approvisionnement », a déclaré à l’agence Ian Moore, associé de recherche principal de la société de courtage mondiale Bernstein.

Cependant, trouver des acheteurs alternatifs pour les produits raffinés devrait devenir un problème plus important pour la Russie. Les volumes de pétrole brut à prix réduit du pays sont actuellement en forte demande en Inde et en Chine, deux pays qui sont de grands exportateurs de produits pétroliers et qui disposent de vastes capacités de raffinage.

« Alors que l’interdiction laisserait à la Russie plus de brut à exporter, il n’y aurait peut-être pas assez de destinations vers lesquelles exporter le surplus, et la Russie devrait donc réduire sa production de 5 à 10% », a déclaré Pei Hwa Ho, analyste énergétique à la DBS Bank.

Le mois dernier, la Russie a augmenté l’approvisionnement en diesel des ports africains et méditerranéens dans le but de détourner les approvisionnements. En décembre, le vice-Premier ministre russe Alexander Novak a déclaré que les approvisionnements seraient redirigés vers l’Asie, l’Afrique et l’Amérique latine, ajoutant que Moscou préférerait réduire la production de pétrole plutôt que d’accepter tout plafonnement des prix.

Luc MICHEL (Люк МИШЕЛЬ)

* Avec le Géopoliticien de l’Axe Eurasie-Afrique :
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